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Comprendre le triangle d’exposition

Le triangle d’exposition c’est l’équilibre nécessaire entre le temps d’exposition, l’ouverture du diaphragme et la sensibilité iso pour obtenir une photo bien exposée.

Analogie du triangle d'exposition

Prenons une analogie :
J’ai besoin de 100 litres d’eau. Je dispose de seaux de 10 litres et de plusieurs robinets.
Pour obtenir les 100 litres, je peux :

  • Remplir 10 fois de suite un seau avec un débit d’eau tel qu’il faut 1 minute par seau (cadre bleu)
  • Remplir 10 fois de suite un seau en ouvrant en grand le robinet de sorte que le seau est rempli en 10 secondes (cadre vert)
  • Remplir en même temps 10 seaux (cadre rouge) avec un débit d’eau faible ou élevé et donc plus ou moins rapidement.

Et bien entendu je peux utiliser tous les réglages intermédiaires de nombre de seaux, d’ouverture du robinet et donc de temps de remplissage.

En photo, le nombre de seaux c’est la sensibilité (les iso), le débit de l’eau c’est l’ouverture du diaphragme, et le temps de remplissage c’est le temps d’exposition. Pour qu’une photo soit bien exposée, il faut régler ces 3 paramètres de telle sorte que le le capteur reçoive assez de signal (qu’on ait les 100 litres à la fin).

Alors pourquoi choisir une « solution » plutôt qu’une autre ? Est-ce que le résultat est différent suivant ce qu’on choisit ?

L’équilibre

Que les paramètres d’exposition soient déterminés
– complètement automatiquement par le boitier, (mode auto),
– en partie par le boitier, et en partie par le photographe (mode priorité à la vitesse ou à l’ouverture, mode iso automatiques),
– ou complètement imposés par le photographe (mode manuel)
les trois paramètres : vitesse, ouverture et sensibilité iso sont toujours déterminés quand on prend une photo.
Et on retrouve leurs valeurs dans les exifs. Par exemple 800 iso, f/5.6, 1/250° sec

Un bon équilibre entre temps d’exposition/diaphragme/iso se traduit par
– une photo nette
– une profondeur de champ qui met en valeur le sujet
– un bon piqué
– Un bruit acceptable

Cet équilibre varie grandement suivant les conditions de prise de vue, et du matériel dont on dispose. Parfois, on doit faire des concessions sur un des éléments pour préserver les autres.

La netteté

La netteté de la photo dépend bien entendu d’une bonne mise au point, paramètre indépendant du triangle d’exposition qu’on supposera bien réglé pour la suite. On ne parle pas ici bien sûr des flous de bougé volontaires à des fins artistiques.

La netteté dépend en grande partie du temps d’exposition compatible avec :
– La luminosité ambiante : photo de nuit, à l’ombre, en plein soleil…
– le sujet : un sujet immobile ne se photographie pas comme un cheval au galop
– La focale : la moindre vibration avec un gros téléobjectif se traduit par un flou de bougé important
– Le matériel photo : un boitier sur pied permet d’allonger le temps de pose par rapport à une photo à main levée
– les objectifs et/ou les capteurs stabilisés permettent également d’allonger le temps de pose à main levée en compensant un léger bougé.

Bien tenir son boitier, contrôler sa respiration sont également des paramètres importants pour éviter le flou de bougé.

Quand on débute en photo il y a une règle assez simple à retenir pour des photos en plein jour :
Pour les capteurs plein format :
« La vitesse doit être plus rapide que l’inverse de la focale »
Si on a une focale de 200mm, la vitesse doit être le 1/200°sec ou plus rapide. Pour une focale de 100mm, 1/100°sec minimum.
Pour un boitier APS-C ou un micro 4/3, il faut appliquer le facteur de correction. Par exemple pour un Fuji ou un Nikon APS-C, 300mm correspondent à 450mm et il faudrait donc une vitesse plus rapide que 1/450°sec.

Avec la pratique, on finit par connaître ses propres limites, avec son boitier, et savoir si on peut ou pas prendre une photo au 1/10° de secondes sans flou de bougé et jusqu’à quelle focale on peut le faire. Mais quand on débute, mieux vaut prendre une bonne marge de sécurité.

La profondeur de champ

Portrait avec une faible profondeur de champ

La profondeur de champ c’est un autre terme pour décrire la zone de netteté. Elle varie avec l’ouverture du diaphragme.
Le diaphragme, c’est le rapport entre la focale de l’objectif et le diamètre de l’ouverture.
f/2.8 signifie que le diamètre de l’ouverture est de 2.8 fois plus petit que la focale de l’objectif. C’est un peu contre-intuitif comme notation, car :
– grande ouverture = beaucoup de lumière qui entre (robinet ouvert en grand) = petit chiffre (f/1.4, f/2.8 …) et petite profondeur de champ (faible zone de netteté autour du sujet)
– petite ouverture = peu de lumière qui entre (robinet presque fermé) = grand chiffre (f/16, f/22) et grande profondeur de champ

Choisir l’ouverture du diaphragme, c’est choisir la profondeur de champ.
Quand on fait un portrait, on veut généralement qu’il se détache du fond. On obtient cet effet en ouvrant le diaphragme, par exemple à f/4. La mise au point étant faite sur l’oeil, le fond est flou et les lumières peuvent créer cet effet de bokeh (les ronds lumineux) qui sont appréciés pour ce style de photo.

En revanche, pour des photos de paysage, on souhaite plus souvent que la netteté soit bonne du premier plan à l’arrière plan, et pour obtenir cette netteté, on ferme au contraire le diaphragme, par exemple à f/11 ou f/16.

Mais les objectifs photos ne sont pas tous aussi bons techniquement à toutes les ouvertures de diaphragme. Leur piqué varie.

Le piqué

Piqué d'un objectif en fonction de l'ouverture du diaphragme

Le piqué d’un objectif fait référence aux notions de contraste et de résolution, c’est à dire à la capacité à distinguer deux points très proches l’un de l’autre. C’est un paramètre important pour la perception de la netteté d’une photo.
Certains objectifs sont très mauvais, d’autres excellents, mais dans tous les cas le piqué varie toujours en fonction de l’ouverture de l’objectif et de la zone de la photo.
Un objectif est en règle générale meilleur au centre que sur les bords, et moins bon à pleine ouverture ou pleine fermeture que pour les valeurs intermédiaires.
Pour l’objectif analysé ci-contre, on voit qu’il est mauvais au centre comme sur les bords à pleine ouverture (f/1.4), qu’il s’améliore dès f/2, atteint son meilleur, au centre comme au bord vers f/4, puis perd peu à peu pour être mauvais à nouveau à f/16. Ce type de courbe en cloche varie suivant les objectifs mais elle est très commune.
On conseille habituellement de fermer d’un ou deux diaphs (ou crans ou stops) pour atteindre le meilleur piqué.

Donc même quand un objectif peut se fermer jusqu’à f/32 ou f/40, il est très rare qu’on utilise cette valeur car cela se fait au détriment de la qualité.

Le bruit

Bruit à 12800 iso

Sur une pellicule argentique, la sensibilité, indiquée en ASA, est obtenue en contrôlant la taille et la distribution des cristaux d’halogénure d’argent dans l’émulsion du film. Plus ces cristaux sont gros, plus la pellicule est sensible à la lumière.

En photo numérique, le capteur ne change pas quand on change avec la sensibilité. Celle-ci s’exprime en ISO. Quand on passe de 200 à 12600 iso comme sur la photo ci-contre, on amplifie électroniquement le signal reçu par le capteur. Mais en amplifiant le signal intéressant, celui du sujet, on amplifie également le bruit, les points plus ou moins colorés que l’on voit sur l’image.
Par analogie avec les images argentiques, ce bruit est parfois aussi appelé du « grain ». C’est la même chose.

D’où vient le bruit sur une image ?

Il y a essentiellement deux sources de bruit : la lumière elle même et le capteur.

La source principale de bruit vient de la nature particulaire aléatoire de la lumière :
A un instant donné, le nombre exact de photons arrivant sur le capteur varie aléatoirement, tout comme celui des gouttes de pluie tombant sur une surface.
Ces variations naturelles du signal capté constituent le bruit photonique. Plus il y a de lumière (donc de photons), plus ces variations deviennent négligeables.

Le bruit du capteur vient de l’addition du bruit thermique et du bruit de lecture.
Les électrons dans le capteur s’agitent avec la chaleur, créant des signaux parasites. Plus le capteur est chaud, plus ce bruit est important.
Lors de la conversion du signal analogique (charges électriques) en signal numérique, des imprécisions s’ajoutent, comme des parasites sur une ligne téléphonique.
Ces deux types de bruit sont particulièrement visibles dans les zones sombres de l’image, où le signal est faible par rapport au bruit.

Quand il y a peu de lumière et qu’on augmente les iso, on augmente à la fois le signal et les parasites, et donc le bruit augmente.
C’est encore plus visible si on essaie de récupérer une photo sous exposée en augmentant l’exposition en post traitement.

Idéalement, on essaie donc toujours de garder les iso le plus bas possible pour éviter le bruit. Les iso les plus bas c’est ce qu’on appelle les isos « natifs » du boitier, ce sont ceux où l’amplification électronique est la plus faible. Suivant les boitiers ils sont en général de 64, 100 ou 160 iso.

Les boitiers modernes, hybrides en particulier, ont une gestion de la montée en bruit qui est incomparablement meilleure que ce qui se faisait il y a seulement quelques années. Les logiciels de post traitement sont aussi de plus en plus capables de réduire ce bruit, notamment grace à l’IA qui supprime le grain en gardant les détails signifiants du sujet. Ce n’est pas miraculeux, mais… pas loin !

Le triangle d’exposition

Donc idéalement, on prend une photo aux iso natifs de son boitier, disons 100 iso, au 1/100°sec et à f/11 ? Mais comment faire si on ne peut pas ?

Ce qu’il faut toujours garder en tête c’est la vitesse. Il vaut mieux une photo avec du bruit mais nette qu’une photo sans bruit mais floue !

La bonne exposition nécessite donc un équilibre entre le temps de pose T, l’ouverture du diaphragme O et la sensibilité S. (les valeurs ici sont seulement indicatives). C’est ce qu’illustre le schéma de gauche. Et chacun de ces 3 paramètres a une influence sur le rendu de la photo en termes de netteté, de profondeur de champ et de piqué et de bruit.

Cette bonne exposition c’est en fait la surface du triangle.

Le triangle d'exposition
Variations des paramètres pour une même exposition

Le schéma de droite illustre le fait qu’on peut garder la même SURFACE du triangle, et donc exactement la même exposition et la même quantité de lumière arrivant sur le capteur, mais avec différents paramètres d’ouverture, de temps de pose et de sensibilité.
Ils sont dépendants. Si j’augmente un des paramètres, je dois diminuer en proportion les deux autres.

Prenons dans le tableau ci-dessous quelques exemples de paramètres qui aboutissent tous exactement à la même exposition du capteur.
Pour simplifier les calculs, disons que mon boitier ne me permet pas de descendre à une sensiblité inférieure à 100 iso et que mon objectif ouvre à f/4 au maximum. Son piqué idéal se situe donc probablement entre f/5.6 et f/11 ou f/16.

Toutes les situations ci-dessous aboutissent à une même exposition (même surface des triangles ci-dessus).
Dans tous ces cas, le temps d’exposition est correct, la photo devrait être nette (avec un objectif standard, pas avec un super télé !).

Choix des paramètres d'exposition

Mais à f/32 ou à f/4 l’objectif perd du piqué. A 1600 iso, suivant le boitier on peut avoir un bruit gênant
Pour faire une photo de paysage, je choisirai plutôt la première ligne, même si celle à f/16 convient également. Pour un portrait en lumière naturelle, la dernière ligne convient tout à fait.

L’histogramme sur le boitier permet de vérifier que les paramètres choisis donnent une bonne exposition.

Comment corriger l’exposition ?

J’ai pris une photo et je vois sur l’histogramme qu’elle est sous exposée. Quel paramètre changer ?

La première chose à regarder, en zoomant sur l’écran du boitier c’est si la photo est nette et quelle était la vitesse utilisée.
Dans l’exemple ci-dessus, si au 1/200° la photo est nette mais sous exposée, on peut exposer plus longtemps : 1/100° voire 1/50 ou 1/25° suivant la focale utilisée, la stabilisation du capteur et de l’objectif éventuelle et sa stabilité.
On peut aussi ouvrir le diaphragme à f/8 par exemple. Mais cela va diminuer la profondeur de champ et il faut qu’elle reste compatible avec la zone de netteté souhaitée.
Et on peut aussi augmenter la sensibilité. Avec les boitiers modernes, on peut en général monter jusqu’à 800 iso sans problème mais il faut avoir vérifié cela avant sur son boitier. Pour des scènes très sombres et avec des mouvements (spectacles par exemple) on peut être amené à travailler avec de très hauts iso pour garder une vitesse assez rapide.

Inversement, si je veux diminuer l’exposition parce que la photo est sur exposée, le premier paramètre à changer c’est la sensibilité. Si on n’est pas à la plus basse possible, on ne peut qu’y gagner en qualité.
Ensuite, on diminue le temps de pose, et ce n’est qu’en dernier qu’on ferme le diaphragme.

Le cas particulier des pauses longues

On peut vouloir allonger le temps de pose, typiquement pour faire un filé sur l’eau d’une cascade ou de vagues.
En plein jour, même en fermant le diaphragme au maximum, en mettant les iso au plus bas, le temps de pose reste encore trop court. Dans ce cas, il faut recourir à des filtres gris neutres qui vont diminuer la quantité de lumière arrivant sur le capteur.

2 commentaires sur “Comprendre le triangle d’exposition”

  1. Hello, j’ai bien aimé revoir toutes ces explications et cela m’amène à une question. après 30 ans passé chez Canon, j’ai tout revendu pour passer à l’hybride chez nikon. Un vrai challenge. J’ai un Z6III et un 180-600mm F5,6-6,3. Dans tes explications sur le triangle d’expo tu termines par dire que cela est valable pour un objectif standard pas un télé. Ayant des difficultés à retrouver une netteté comme le 500 F4 de chez Canon que j’avais, je me pose la question de savoir s’il y a un (des) réglage(s) particulier(s) à faire? Comme on me l’a toujours conseillé j’ai déjà débraillé le mode « anti vibration » car mon objectif est mis sur un support de portière voiture ou un trépied, je suis souvent à f 6,3 devrais-je fermé de 2 crans au risque de perdre en luminosité? Dois-je alors le plus souvent travailler à la focale approchant 400mm ou le piqué serait plus propre et perdre l’avantage d’un zoom 600mm? Merci pour ton avis éclairé

    1. Bonjour Pascal,
      Les valeurs de temps d’expo que je donne dans ce tableau sont simplement des exemples. Si tu shootes au 1/200° avec un 500mm, c’est plus que risqué ! Je ne connais pas ton matériel mais ce que je te conseille c’est de vérifier par toi même ce qu’on te dit. Mets toi dans les meilleures conditions possibles, sur pied, avec une bonne luminosité pour commencer, et shoote aux différentes ouvertures, et plusieurs focales, avec et sans stabilisation. Regarde ensuite tes photos à 100% et compare. C’est important de connaitre les limites de son matériel. Si tu fermes de 2 crans à 6.3, tu vas devoir compenser soit en augmentant le temps d’expo avec un risque de bougé, soit en augmentant les iso avec un risque de bruit. Si ton objectif est vraiment pas bon à pleine ouverture ça peut se justifier mais il faut que ça en vaille la peine. Je n’enlève la stabilisation pour ma part que quand je fais des poses longues ou des timelapses (pour une autre raison). Je n’ai pas constaté qu’elle faisait perdre du piqué.

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