L’histoire du blanc est ancienne. Présente dès la préhistoire, cette couleur est associée à la pureté, à la divinité dans de nombreuses civilisations.
Cet article fait partie de la série « les couleurs, toute une histoire » à laquelle appartiennent également les articles suivants :
Histoire du bleu, celle d’un paradoxe
Histoire du vert, couleur ambivalente
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Histoire du jaune le mal aimé
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Querelle de couleur

En 1124 les moines cisterciens, conduits par leur prélat Saint Bernard de Clairvaux, s’habillent de blanc tandis que les moines bénédictins et Pierre le Vénérable, théologien et abbé de Cluny sont en noir. Saint Bernard reproche à Pierre le Vénérable de s’habiller de la couleur du diable. Celui-ci lui répond que le noir c’est la couleur de la tempérance, de l’humilité, et que de s’habiller en blanc qui est la couleur du Christ, mais aussi celle de la fête, de la pureté c’est faire preuve de grand orgueil. Cette querelle chromatique, qui dure jusqu’en 1145 illustre cette opposition entre blanc et noir.
Elle reste encore extrêmement forte même si elle s’atténue un peu de nos jours.
Mais historiquement comme on l’a vu avec le noir, le blanc a eu deux contraires : jusqu’à la fin du Moyen -âge c’était le rouge. Avec l’apparition de l’imprimerie et de la gravure le couple blanc/noir s’impose. On trouve encore cependant cette opposition blanc/rouge par exemple dans les panneaux de signalisation routière.
Le mot blanc en français vient du germanique ancien blank qui signifiait brillant ou clair. Cette origine germanique remonte approximativement au Ve-VIe siècle, lors des invasions franques en Gaule. Blanc a progressivement remplacé le terme latin albus qui a donné aube et albâtre.
Le blanc est présent dans les grottes ornées dès la préhistoire. Cela reste la couleur la plus employée dans la peinture occidentale. Le blanc est produit dès la préhistoire à base de craie, d’argile blanche comme le kaolin, ou de calcaire, mais surtout à base de plomb à partir de l’époque romaine : la céruse ou blanc de plomb.
La céruse, ne coute pas cher, s’emploie et se mélange facilement, mais elle est extrêmement toxique. On le sait, et pourtant, jusqu’au XVIII° on l’emploie quand même, non seulement en peinture, mais aussi dans les fards et les cosmétiques. Le désir de paraître est plus fort que la peur de la mort.
Peu à peu à partir du XIXe, le blanc de plomb sera remplacé par un blanc de zinc, puis de titane, moins toxiques.
Le blanc est une couleur divine dans de nombreuses civilisations, liée au sacré. La lune, l’astre blanc par excellence, a été honorée très tôt en Europe. Les prêtres, les servants hommes ou femmes sont souvent habillés de blanc. Mais ce n’est pas un blanc synonyme de couleur ou d’incolore. Cette synonymie est très récente.
Dans la religion chrétienne, au début, le blanc, mais plus encore le « non-teint » est associée à la notion de pureté, et les vêtements du prêtre ne sont pas teints. Depuis le XIIe siècle le blanc est la couleur liturgique, portée par le prêtre, associée à la Vierge Marie. Mais la Vierge elle-même est souvent représentée vêtue de sombre car portant le deuil de son fils. A partir du XIIe elle devient habillée de bleu, puis de doré. La proclamation par Pie IX en 1854 du dogme de l’immaculée conception de la Vierge va de pair avec l’apparition du blanc dans ses représentations.
Dans l’iconographie chrétienne, les anges et les saints sont souvent représentés vêtus de blanc, et cette couleur est associée à la résurrection du Christ. Cette symbolique spirituelle se retrouve aussi dans d’autres religions, comme l’hindouisme où le blanc représente la connaissance pure.
Symbolique

Dans les sociétés occidentales, le blanc évoque d’abord la pureté, l’innocence et la virginité, ce qui explique son usage traditionnel dans les robes de mariée et les vêtements de baptême.
Il symbolise également la lumière divine, la transcendance et la spiritualité.
Plusieurs animaux sont associés à ces symboles du fait de leur couleur, en particulier la colombe, l’agneau (pascal), la licorne et le cygne. On les trouve dans de nombreuses mythologies. Aujourd’hui encore en Angleterre, tous les cygnes appartiennent au roi et un particulier n’a pas le droit d’en détenir.
Le blanc c’est la couleur de la propreté, de l’hygiène et de la stérilité, d’où son utilisation dans les milieux médicaux et les produits d’entretien.
Il représente également la sagesse et la clarté d’esprit. On parle de « magie blanche » par opposition à la « magie noire », et la « blancheur » peut évoquer la transparence morale et l’honnêteté.
Le blanc peut aussi représenter la neutralité, le vide ou l’absence. On parle de « page blanche » pour évoquer l’absence d’idées, de « voix blanche » pour une voix sans émotion, ou de « vote blanc » pour exprimer un refus de choix. Cette neutralité peut être perçue négativement comme un manque de caractère ou de personnalité.
Dans plusieurs cultures asiatiques, notamment en Chine et au Japon, le blanc est traditionnellement la couleur du deuil et de la mort, symbolisant le passage vers l’au-delà et la renaissance. Cette association avec la mort se retrouve aussi en Occident à travers l’image du spectre ou du fantôme.
Dans certains contextes, le blanc évoque le froid, l’hiver et la solitude. La blancheur clinique d’un lieu peut être ressentie comme froide et impersonnelle. Le blanc peut aussi symboliser la pâleur de la maladie ou de la peur, comme dans l’expression « blanc comme un linge ».

En art et en design, le blanc est souvent utilisé pour créer un sentiment d’espace, de calme et de modernité. Il symbolise la simplicité, la perfection et l’épurement des formes, comme dans le mouvement moderniste en architecture.
Dans le contexte politique et social, le blanc a historiquement été associé à la monarchie et au conservatisme, comme avec les « Blancs » pendant la Révolution française. Cette symbolique politique persiste encore dans certains contextes.
Ecouter l’interview de Michel Pastoureau sur cette couleur sur radiofrance