Comment faire du focus stacking sans fonction dédiée sur le boitier et sans rail macro ?
En macro (proxi) il est rarement possible d’obtenir une image nette sur toute la profondeur de l’objet en une seule prise de vue. Le focus stacking consiste à faire une série de clichés en décalant la zone de mise au point.
Beaucoup de boitiers récents ont une fonction qui permet de réaliser cette série de photos. Il est nécessaire pour ça que la mise au point sur l’objectif soit pilotée par le boitier, autrement dit, cette fonction est inopérante avec les objectifs « manuels ».

Mais tout le monde n’a pas un boitier doté de cette fonction et un objectif macro compatible.
Dans ce cas, un bonne solution, c’est de mettre le boitier sur un rail macro, lui même installé sur un pied et décaler la mise au point avec la vis du rail. Cette façon de faire est détaillée dans cet article.
Le rail est parfait en intérieur, et en extérieur quand il n’y a pas de vent. En Occitanie, avec le vent d’Autan, c’est pas gagné ! Et en macro, le moindre souffle de vent ressemble rapidement à une tempête. Et puis, le pied photo et le rail macro c’est un peu encombrant en balade. Alors faut-il renoncer à faire du focus stacking ?
Focus stacking en rafale

Pour cette photo de cette Orchys pourpre qui nous regarde en rigolant, j’ai travaillé à main levée, sans rail et changé manuellement la mise au point tout en faisant une série de 9 photos en mode rafale. Ces photos ont ensuite été empilées avec Helicon focus comme décrit précédemment.
Préparation
La première étape c’est de repérer quel est le plan le plus éloigné, celui le plus proche, et dans quel sens il faut tourner la bague de mise au point pour aller de l’un à l’autre.
Pratiquement tous les objectifs sont soumis au phénomène de focus breathing, c’est à dire à une modification de l’angle de prise de vue quand on change la mise au point. C’est du reste un des gros avantages du rail macro : comme on ne touche pas à la mise au point, l’angle de prise de vue est constant.
Pour être sûre que le cadrage final englobe tout le sujet, je fais toujours la mise au point sur le plan le plus éloigné (idem avec un rail macro). Je fais quelques essais à vide pour évaluer de combien de degrés environ il faut tourner la bague de mise au point.
Réglages
La grosse difficulté bien entendu c’est qu’il faut rester immobile, tout en bougeant la bague de mise au point ! Si vous avez un petit pied comme celui présenté sur la photo du haut (un rollei très pratique pour emporter partout) c’est évidemment plus facile. Sinon il faut aussi apprendre à ne pas respirer pendant la prise de vue 😊.
Il faut aller vite ! Il faut donc que le temps d’exposition soit court. Les objectifs ne sont jamais à leur meilleur quand on ferme trop le diaphragme. Celui que j’utilise ouvre à f/2 mais il est meilleur à f/4 ou f/5.6. Plus le diaphragme est ouvert, plus la plage de mise au point est courte (voir le triangle d’exposition). Pour plus de sureté, je choisis plutot f/5.6.
En fonction de la lumière, je monte les isos si nécessaire pour assurer une vitesse d’au moins 1/500°.
La mise au point est en mode manuel, la stabilisation du boitier est désactivée et le mode de prise de vue est sur rafale. Sur certains boitiers il y a plusieurs modes rafales. Choisir celui qui prend les photos en pleine taille et en raw le cas échéant.
Déclenchements
Il faut souvent faire plusieurs essais !
Sur la carte mémoire c’est pas toujours évident de s’y retrouver. Une astuce fournie par Olivier Rocq que j’utilise beaucoup c’est de prendre mes doigts en photo pour séparer les différents essais. Dans tous les cas, même si au premier coup j’ai l’impression que c’est correct, je refais au moins deux ou trois prises (10 si nécessaire !).
Je positionne la mise au point sur le plan le plus éloigné, je déclenche et je fais varier la mise au point vers l’avant.
Assemblage
Il n’y a « plus qu’à » assembler la ou les meilleurs séries avec Helicon focus.
Après avoir lancé l’application, j’ouvre directement les raw. De cette façon, en sortie d’aurai un fichier DNG avec toute la latitude de correction dont je dispose sur les raw.
Il y a plusieurs méthodes d’empilement possible. Lorsque les photos se suivent dans l’ordre de mise au point, ce que Helicon focus appèle « pyramide », même avec un petit nombre de photos, c’est quasiment toujours la méthode C qui donne les meilleurs résultats de mon expérience. Mais vous pouvez aussi tester les autres méthodes d’empilement.
Vous pouvez toujours essayer avec photoshop de faire l’empilement des zones nettes. Mais comme en général, il y a des décalages assez significatifs entre les photos, Helicon focus est bien plus puissant pour les rattraper.
Finitions avec Helicon focus

Un des avantages majeur d’Helicon focus c’est qu’après assemblage, on peut corriger les zones avec des défauts.
Par exemple ici ce liseré autour d’un bout de feuille. Il faut pour cela passer dans l’onglet retouche.
Ici il n’y a que quelques photos, c’est donc facile de les passer en revue pour savoir quelle est la plus nette dans cette zone. Mais en mettant la souris au dessus de la zone à corriger et en appuyant sur la touche 9, Helicon l’affiche dans la fenêtre de gauche. Pratique ! Souvent la photo la plus nette est celle juste avant ou juste après celle utilisée par Helicon focus.
Il suffit alors de cliquer et la souris (ou le stylet de la tablette graphique, bien plus pratique) se transforme en tampon qui copie dans la photo de gauche ce qui est au même endroit et le colle dans la photo finale.
Travailler le flou d’arrière-plan

Faire ces corrections pour la netteté c’est très utile. Mais on peut aussi le faire pour le flou d’arrière plan.
En effet, Helicon focus cherche à avoir l’image la plus nette partout. Ce qui est souhaitable pour le sujet l’est moins pour l’arrière plan.
Ici je vais donc chercher la photo de la série ou le fond est le plus doux et copier cette zone sur la photo finale.
J’enregistre au format DNG,je l’importe dans lightroom classic, j’y fais les réglages de cadrage, d’exposition, couleur et autres si nécessaire.
Les derniers peaufinages sont faits dans photoshop, en particulier avec le pinceau mélangeur pour fondre certaines couleurs à l’arrière plan.
Conclusion
Certes c’est plus précis facile de travailler avec un rail macro, plus confortable d’utiliser la prise de vue en mode focus stacking du boitier quand on le peut. Mais quand on ne peut pas, cette solution permet d’obtenir des clichés impossibles à obtenir, même en fermant le diaphragme au maximum. essayez !
Et voici deux autres photos faites avec cette technique de ces si belles orchidées sauvages qu’il faut protéger.

